𝐂𝐚𝐡𝐢𝐞𝐫 𝐝’𝐡𝐢𝐯𝐞𝐫𝐧𝐚𝐠𝐞 𝐝’𝐮𝐧 𝐣𝐨𝐮𝐫𝐧𝐚𝐥𝐢𝐬𝐭𝐞 𝐈𝐓 – “L’hivernage s’en alla à regret”, laissant derrière lui des souvenirs humides et parfumés de terre mouillée. Il s’en va toujours ainsi, chaque année, comme une promesse non tenue, un rappel mélancolique que même les plus belles choses sont éphémères. Ce départ, je l’ai appris jeune, dans une salle de classe de l’école primaire de Mboumbaye Gandiol, là où nos instituteurs nous enseignaient à lire le monde dans toute sa complexité, à en saisir les nuances. Le texte qui me revient, je l’ai puisé dans ces « annales », ces recueils qui nous préparaient à affronter les examens de la vie, et à chaque fin d’hivernage, il résonne en moi comme un écho doux-amer.
Dans ces contrées où la pluie n’est pas seulement une bénédiction mais un chant, un appel, une ode à la vie, j’ai appris à aimer l’hivernage. Je comprends, certes, les tourments que cause la pluie à Dakar et dans les régions, où les rues se transforment en fleuves et où les maisons tremblent sous le poids des eaux. Mais je pointe plus l’humain que le divin, car c’est davantage un problème d’aménagement qu’une fatalité céleste. Ailleurs, la pluie est domptée, utilisée à bon escient, source de vie. Et l’éleveur, l’agriculteur, le campagnard que je suis, ne peut détester la pluie. Elle est la source même de notre subsistance, elle nourrit la terre, elle fait croître nos récoltes, elle nous épargne les travaux harassants de l’irrigation.
À Gandiol, l’approche de la pluie était un rituel, une danse silencieuse entre ciel et terre. Le ciel se chargeait de nuages lourds, prometteurs, les oiseaux volaient bas, annonçant l’orage. Les paysans pressaient le pas pour rejoindre leurs demeures, et nous, les enfants, sortions excités, impatients de nous baigner sous cette pluie bienfaitrice. C’était un moment sacré, une communion entre nous et la nature. Je me souviens encore de la sensation des premières gouttes sur ma peau, de l’air frais qui précédait l’averse, de cette odeur incomparable qui montait du sol, mélange de terre et d’humidité. Nous chantions les louanges d’Allah, l’invoquions pour qu’il nous gratifie d’une pluie riche et abondante.
Les rites de nos parents accompagnaient chaque averse. L’interdiction formelle d’utiliser la radio ou la télévision pendant qu’il pleuvait. Il fallait couvrir les miroirs d’un linge, de peur qu’ils ne capturent la foudre. Et que dire du tonnerre, ce grondement sourd qui faisait trembler les murs et les cœurs. J’en ai vu des parents apeurés, murmurant des prières à l’approche des éclairs. Ces éclairs qui zébraient le ciel de mille feux, parfois si intenses qu’on aurait cru à des éclats de verre, des morceaux de lumière brisée éparpillés dans l’immensité.
Et nous, enfants insouciants, chantions sous la pluie, gambadions dans les flaques, le cœur léger. Le lendemain, les champs nous attendaient, gorgés d’eau, et la pluie nous épargnait la tâche d’arroser. Une corvée de moins, un sourire de plus.
Mais, l’hivernage s’en va toujours. La pluie cesse, les champs sèchent, le ciel se dégage, et avec lui s’envole une part de cette joie simple, de cette innocence. Et chaque année, c’est un pincement au cœur de voir cette saison passer, de savoir qu’il faudra attendre encore, patienter avant que le ciel ne s’ouvre de nouveau pour nous offrir ces moments suspendus, où la nature reprend ses droits, où l’homme se fait tout petit face à la grandeur des éléments.
Je prie Dieu que nous tous survivions et profitions de mille autres hivernages, pour que chaque année, nous puissions encore chanter sous la pluie, respirer cet air unique et communier avec la terre, en espérant que les pluies futures soient tout aussi riches et abondantes que celles qui ont façonné nos souvenirs d’enfants.
L’hivernage s’en alla à regret, et avec lui, une partie de nos rêves d’enfants.
Les adieux silencieux de l’hivernage, c’est un sujet profond ! Explorer les changements saisonniers et leur impact est très important pour notre environnement. Interagissez avec nous pour partager des points de vue et approfondir les discussions. Salutations de Telkom University Jakarta