Il est reparti comme il était venu : calme, discret, respectueux. Homme de défis, Moustapha Yacine Gueye avait su allier, comme l’aurait bien voulu Léopold Sédar Senghor, premier président de la République du Sénégal, l’enracinement à l’ouverture. Même sorti des plus prestigieuses écoles d’ingénieur, le si bien réputé expert et acteur des télécommunications à l’échelle africaine et internationale avait su rester sobre, lui qu’on disait milliardaire, et donc, si bien riche. Mais en définitive, il était plutôt riche de son humilité. Une humilité qu’il a portée en bandoulière ou plutôt qui l’a porté partout dans le monde, jusqu’aux Émirats Arabes Unis d’où il nous parlait souvent, dans le cadre de nos émissions.
Cet article qui se veut un hommage à son brillant parcours et à un dévouement sans faille pour son pays et l’Afrique est fort judicieusement sous-titré : « l’homme que je ne vais jamais rencontrer ». Et c’est d’autant plus justifié qu’à plusieurs reprises, j’ai tenté de l’approcher, de le rencontrer, de le questionner sur sa riche expérience d’ingénieur télécom. La première fois où nous avions échangé date du 19 juillet 2020. Ce jour-là, réagissant à un de nos panels sur les MVNO et les FAI -il était même intervenu en direct – revoir replay), Moustapha Yacine Gueye avait tenu à nous sensibiliser aux difficultés économiques qui allaient se poser aux adjudicataires. Des années après, pas du tout aisé d’en conclure qu’il avait tort !
« J’ai été sous le choc en apprenant cette terrible nouvelle du décès de Moustapha Yacine. Je le considérais comme quelqu’un de très intelligent, une référence. Je ne l’ai pas connu de manière très rapprochée. C’était l’ami à mon grand frère. Tous habitaient Dieuppeul à l’époque. Je l’ai connu très tôt. De par son intelligence, ses idées, il était brillant. Nous ne nous sommes revus qu’au début des années 2000 et c’était sur le plan professionnel », témoigne Achime Malick Ndiaye, grand connaisseur de l’homme et par ailleurs, Directeur des TIC au Ministère de l’économie numérique et des télécommunications.
« Moustapha est un des acteurs du secteur qui l’a marqué de sa vision et de son esprit prospectif. Dès qu’on a décidé de libéraliser, il fait partie des premiers qui ont pu mettre en place, avec d’autres éventuellement, l’actuel Free, dans les années 90. Il était au niveau d’ABM et d’autres structures. Chaque fois qu’il y a une brèche d’ouverture du secteur vers de nouvelles orientations et de nouvelles perspectives, il a fait partie de ceux qui en portaient le leadership. Il était aussi intervenu sur l’implantation et la mise en œuvre du service universel au Sénégal », se souvient Malick Ndiaye, membre du Collège de l’ARTP et l’un des acteurs qui ont conduit et réalisé beaucoup de projets impacts dans les Technologies de l’Information et de la Communication au Sénégal.
« Une grande sommité dans l’écosystème des télécommunications est partie à jamais », écrit de son côté Seyni Malan Fati, ancien haut cadre à l’ARTP et responsable à GSMA, évoquant d’ailleurs ses « moments les plus durs à l’ARTP » marqués par le soutien du défunt ingénieur : « j’ai su remonter la pente et continuer à me bonifier grâce à ses conseils et son accompagnement », confie-t-il sur Linkedin.
Grand militant de la cause mouride, Moustapha Yacine Gueye s’en va ainsi, laissant derrière lui une famille éplorée, une confrérie et des camarades dans la tristesse et un secteur des télécommunications déjà orphelin de son inspirateur.
Puisse Allah l’accueillir au Paradis !