Ingénieur Réseau & Télécom, président co-fondateur de la plateforme citoyenne Poli-TIC, Thiendella KEBE fait partie de cette nouvelle génération de talents sénégalais qui conjuguent expertise technique et engagement civique. Très actif sur les questions de gouvernance numérique, il nous livre ici une réflexion poignante, née d’une scène vécue au cimetière musulman de Yoff. Entre émotion, innovation et service public, son propos pose les jalons d’une idée simple mais puissante : la digitalisation complète du processus d’inhumation, avec cartographie précise des tombes à l’appui.
Dans une société où le lien avec les défunts reste essentiel, cette contribution invite les startups à s’engager sur un terrain à la fois sacré et trop souvent négligé : celui de la mémoire numérisée.
Un fait qui peut paraitre anodin a suscité mon attention ce dimanche 06 juillet 2025 au cimetière musulman de Yoff. En marge des visites que beaucoup de Sénégalais de tout bord effectuent à l’occasion de fêtes religieuses, un émigré qui était venu faire son « ziar » auprès de sa défunte maman, arrachée à son affection il y a huit (8) ans, avait du mal à localiser la tombe de cette dernière. En l’approchant pour en savoir plus, nous nous sommes rendu compte que cela faisait autant d’années qu’il n’était plus revenu au Sénégal. Nous étions curieux de lui demander pourquoi ne s’est-il pas fait accompagner par un parent ou proche connaissant les lieux. Il rétorque dé-so-lé-ment que ses frères et sœurs vivent au Sénégal pourtant mais eux non plus ne se souviennent plus de l’endroit exact où est enterrée leur maman car n’y venant presque jamais (…).
Cette anecdote nous a fait réfléchir sur une solution numérique : la mise en place d’une plateforme à « guichet unique » consistant à la digitaliser de tout le processus d’inhumation de nos disparu(e)s allant de l’attestation de décès à l’inhumation en passant par le certificat de genre de mort.
Les différentes tombes peuvent toutes être cartographiées et géolocalisées (S.I.G) sur une plateforme unique avec des habilitations d’accès pour le médecin qui va prononcer et attester le décès. Ensuite, l’administrateur aura la charge d’établir le certificat d’inhumation et enfin au gestionnaire du cimetière d’autoriser tout ce qui reste de la procédure d’enterrement. Cela rendra le processus plus efficace afin que le « jebbël sunu borom » du corps soit efficient comme nous le préconise la religion.
Au terme de l’effectivité de la solution proposée avec toute la couche sécurité qui sied, compte tenu de la sensibilité des données et des informations qui seront adressées au regard de notre culture, toute personne qui se présente au « guichet unique » d’un cimetière, sera référencée. Il pourra ainsi bénéficier d’une mise à disposition dans son téléphone des éléments suivants : N° de la tombe, Nom et Prénom(s), date de Naissance et de décès, Pavillon, Rue, et pour couronner le tout, les coordonnées géoréférencées pour faciliter la localisation exacte.
Cette idée projet doit être un défi pour toute start’up intéressée qui pourrait ainsi proposer des solutions innovantes afin d’améliorer les conditions de gestion de l’ensemble de nos cimetières au Sénégal : les « Bakhiya » de Touba, de Tivaouane, les cimetières catholiques… Même si d’énormes efforts ont été déjà consentis sur l’organisation fluide et maitrisée dans certains de ces cimetières, l’idée pourrait être présentée aux guides religieux respectifs afin de solliciter leur bénédiction.
« Soyons dans l’idéation continue car le succès est quelque chose qu’on attire »
Thiendella KEBE
Ingénieur Réseau & Télécom
