Le Centre international de conférences Abdou Diouf de Diamniadio vient d’accueillir une rencontre capitale pour l’avenir du commerce extérieur sénégalais et africain : le Forum national sur la facilitation du commerce. Ce rendez-vous, organisé en partenariat avec GAINDE 2000 et la Communauté des Acteurs Portuaires (CAP Sénégal), s’inscrit dans une séquence stratégique qui se poursuivra à Saly avec la 11ᵉ Conférence internationale sur les guichets uniques et le 44ᵉ Forum du UN/CEFACT.
Cette édition se déroule dans un contexte marqué par une accélération historique des échanges internationaux, tirée par la digitalisation, la montée de la logistique intelligente et la nécessité pour les pays africains de s’insérer pleinement dans les chaînes de valeur mondiales. Le Sénégal, pionnier régional dans la dématérialisation des procédures douanières, grâce au Guichet Unique ORBUS et au système Gaindé Integral, veut désormais franchir un nouveau cap. Il s’agit non seulement de fluidifier les opérations, mais aussi de transformer ses corridors, d’articuler plus solidement ses acteurs publics et privés, de renforcer l’interopérabilité et la gouvernance des données, et d’anticiper les exigences de la ZLECAf. Le forum entend donc dresser un bilan, identifier les nouveaux défis technologiques et logistiques, valoriser les initiatives nationales et partager les meilleures pratiques internationales
Dans ce contexte, les interventions institutionnelles ont dessiné une vision claire : celle d’un Sénégal qui assume son ambition, revendique sa maturité numérique et entend jouer un rôle moteur dans l’intégration économique africaine.
Dès l’ouverture, Ibrahima Nour Eddine Diagne, Administrateur général de GAINDE 2000, a situé les enjeux : la facilitation des échanges par le digital n’est plus un choix mais “une priorité nationale”, portée par une volonté constante d’innovation. Rappelant qu’en 2008 déjà Dakar accueillait un forum du Centre des Nations Unies pour les Transactions Électroniques, point de départ de l’Alliance Africaine pour le Commerce Électronique, il a souligné l’importance des normes internationales qu’il a contribué à actualiser. Pour lui, l’Afrique doit profiter de la ZLECAf pour “sauter directement dans l’ère numérique”, sans passer par les lourdeurs des systèmes papier. Il a également mis en avant la portée internationale des travaux de GAINDE 2000, saluant les contributions techniques et institutionnelles qui ont permis au Sénégal de devenir un acteur respecté sur la scène mondiale.
Cette vision a trouvé un relais naturel dans l’intervention de Waly Diouf Bodian, Directeur général du Port autonome de Dakar, qui a replacé le thème du forum dans les transformations globales du commerce mondial. Pour lui, le Sénégal a fait le choix de l’anticipation en intégrant la digitalisation au cœur de sa stratégie de développement. Il rappelle que le guichet unique ORBUS et sa déclinaison portuaire ORBUS Infinity ont profondément simplifié les procédures, réduit les délais et renforcé la transparence. Le Port entend désormais s’orienter vers un modèle de smart port, avec une traçabilité de bout en bout, une interconnexion totale avec les systèmes nationaux et une gouvernance collaborative exemplaire avec la Douane. “Le guichet unique est aujourd’hui un instrument de souveraineté économique”, a-t-il affirmé, insistant sur la nécessité de faire du PAD un maillon essentiel de la compétitivité sénégalaise dans le cadre de la ZLECAf.
Le discours de Babacar Mbaye, Directeur général des Douanes, est venu élargir cette dynamique en la plaçant dans une perspective régionale. Soulignant la présence du Mali et d’autres partenaires, il a évoqué l’importance des corridors de transit, essentiels pour relier les pays sans littoral aux marchés internationaux. Selon lui, la digitalisation douanière engagée depuis plus de vingt ans, avec Gaindé, Orbus et les récentes innovations, permet au Sénégal d’être “un pionnier africain de la transparence, de la rapidité et de la sécurité des opérations”. Il a insisté sur le fait que la facilitation des échanges ne peut être portée par une seule administration mais doit s’appuyer sur une coopération étroite entre Douanes, Port, GAINDE 2000, secteur privé et partenaires internationaux. Le forum, selon lui, doit être un espace de dialogue franc, orienté vers des actions concrètes pour renforcer les chaînes logistiques et soutenir la transformation économique.
Au nom du système des Nations Unies, Aminata Maiga, Coordinatrice résidente au Sénégal, a salué l’engagement du pays dans la modernisation de ses infrastructures numériques, alors qu’il se prépare à sortir de la catégorie des pays les moins avancés. Pour elle, la digitalisation, l’interopérabilité et la facilitation du commerce sont des leviers essentiels pour renforcer l’attractivité, attirer les investissements et inscrire durablement le Sénégal dans les chaînes de valeur mondiales. Elle a relié cette dynamique aux objectifs de développement durable (ODD 8, 9 et 17) et présenté l’initiative UN2.0, qui place l’innovation et la science des données au cœur de l’action onusienne. Elle a rappelé que la transformation numérique ne doit laisser personne de côté et doit bénéficier aux PME, aux femmes entrepreneures et aux jeunes innovateurs. “C’est collectivement que nous construirons une économie connectée, inclusive et durable”, a-t-elle conclu.
Au fil des discours, une convergence s’est imposée : la transformation numérique du commerce n’est pas seulement un défi technique mais un levier stratégique de souveraineté, de compétitivité et d’intégration régionale. Le forum doit aussi servir à structurer une meilleure gouvernance logistique, renforcer l’interopérabilité entre douanes, port, APIX, COSEC, CAP Sénégal, opérateurs privés, et évaluer les mécanismes de coordination nécessaires pour bâtir une chaîne logistique performante et durable
En réunissant dirigeants publics, acteurs du secteur privé, experts africains et partenaires internationaux, le Forum national sur la facilitation du commerce a offert au Sénégal une opportunité de consolider sa position de pionnier régional et de préparer la prochaine phase : celle des corridors entièrement numériques, des systèmes interconnectés, d’une gouvernance des données maîtrisée et d’une intégration continentale pleinement opérationnelle.
Le Sénégal entend désormais transformer cette vision en actions concrètes et s’imposer, dans les années à venir, comme l’un des moteurs continentaux du commerce digitalisé et de la logistique intelligente.
